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A Nancy : deux procédures judiciaires pour la défense des services publics

Trois fois par an, des membres d’Attac se rassemblent à Paris pour une « Rencontre des Comités Locaux ». Le week-end des 19 et 20 novembre 2022, deux membres d’Attac-54 ont participé à cette rencontre et animé un atelier présentant deux procédures contentieuses menées ces dernières années à Nancy devant les juridictions administratives.

Ces deux procédures n’ont pas été portées spécifiquement par le comité ATTAC, mais par des groupes de citoyens au sein desquels des militants d’ATTAC ont joué un rôle important. Elles visaient l’annulation de deux contrats de concession signés par la Métropole du Grand Nancy. Si elles n’ont pas abouti à ces annulations, elles ont permis d’obtenir des avancées majeures et ont donné lieu à des décisions de justice de portée nationale favorables aux contribuables locaux et aux usagers des services publics.

1. Recours contre un contrat de concession pour la distribution d’électricité attribué à ENEDIS

Lancé en 2011, ce recours a donné lieu à plusieurs décisions de justice, dont deux de portée nationale.

 • Un arrêt du Conseil d’État en mars 2020. Le Tribunal administratif de Nancy, puis la Cour administrative d’appel avaient jugé le recours « irrecevable » au motif que les requérants n’avaient pas démontré que ce contrat avait un impact sur leurs intérêts personnels. Le Conseil d’Etat a annulé ces décisions et élaboré une nouvelle jurisprudence qui ouvre de nouvelles possibilités pour des citoyens, dans tout le pays, de contester en justice les actes d’une collectivité territoriale.

Un arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Nancy en décembre 2020. En application de l’arrêt du Conseil d’État, la Cour d’Appel a dû rejuger cette affaire, cette fois sur le fond. Elle a annulé une clause du contrat qui prévoyait le versement à ENEDIS, en cas de non-renouvellement du contrat, d’une indemnité qui aurait dépassé de 50 à 70 M€ ce que la loi autorise. Ce sont autant d’économies potentielles pour la collectivité.

2. Recours contre le contrat de concession du projet de Nancy Thermal, attribué à Valvital

Ce que contenait le contrat :

• Transformation de ce site de 3 piscines publiques en centre aquatique, thermal et de bien-être. Destruction de la piscine Louison-Bobet, seule piscine de plein-air de l’agglomération. Son « remplacement » par un bassin extérieur deux fois plus petit, dans un espace « Sports et loisirs » – partie encore dédiée au grand public – réduit à moins de 30 % de l’espace total et relégué dans un endroit mal situé. Le reste du site est dédié à l’accueil de clients aisés, touristes, curistes, sportifs de haut niveau.

• Des tarifs de l’espace « Sports et loisirs » en forte hausse (de 27 à 160 %). Des tarifs « libres » pour le reste du site (exemple : 16 € pour deux heures dans la piscine ronde).

Une opération immobilière (Bouygues : 98 M€ de travaux en 4 ans), commerciale (Valvital, exploitant pendant 26 ans ; complexe commercial comprenant hôtel, restaurant, boutiques…), financière (Omnes Capital, fonds d’investissement détenant 90 % des actions), au détriment du service public.

• Sur les 30 ans de la concession : 86 M€ de subventions versées par la Métropole, à fonds perdus ; 87 M€ de dividendes et 11 M€ d’intérêts pour les actionnaires (dont 90 % pour Omnes Capital).

Après un jugement du Tribunal administratif qui résiliait le contrat, la Métropole et le concessionnaire ont fait appel. Une médiation s’est conclue par un protocole d’accord qui modifie profondément le contrat.

Les acquis du protocole d’accord :

• Transformation de la société concessionnaire – au capital entièrement privé – en Société d’économie Mixte Locale, dont la Métropole devient l’actionnaire majoritaire avec 85 % des actions, se substituant ainsi au fonds d’investissement Omnes.

• De ce fait, grâce aux intérêts et dividendes qu’elle percevra, la Métropole sera en mesure de récupérer une grande partie (potentiellement 70 M€) des subventions qu’elle aurait versées à fonds perdus aux termes du contrat initial.

• Pour les résidents du Grand Nancy, maintien des tarifs actuels d’accès à l’espace « Sport et loisirs », alignés sur ceux des autres piscines de l’agglomération. • Un « comité de suivi » de 12 membres (6 requérants, 3 Métropole, 3 concessionnaire). Il sera obligatoirement consulté sur les modifications de tarifs du pôle « Sports et loisirs », émettra un avis sur le rapport annuel d’activité de la concession et disposera d’un budget annuel de 30 000 € alloué par la Métropole pour faire réaliser un audit annuel des comptes.

3. Des acquis notables de portée nationale

• L’issue positive de ces deux recours confirme, s’il en était besoin, que des luttes peuvent être couronnées de succès, et que l’action déterminée de citoyens peut inverser le cours des choses et agir sur des politiques publiques.

• L’arrêt du Conseil d’État constitue une jurisprudence de portée nationale qui élargit les possibilités données aux citoyens d’agir en justice. Nous avons sans doute été les premiers à en bénéficier dans la procédure de Nancy Thermal. Mais les habitants de toutes les collectivités territoriales françaises peuvent s’en prévaloir auprès des juridictions administratives pour contester en justice une décision de leur collectivité. C’est un outil de plus pour défendre les services publics et l’intérêt des citoyens face aux appétits des grandes entreprises et, souvent aussi, à l’inaction, voire à la complaisance d’élus locaux.

• ENEDIS dessert 95 % du territoire national à travers 365 contrats de concession semblables à celui du Grand Nancy. Les militants d’ATTAC et autres peuvent s’appuyer sur l’arrêt de la Cour d’Appel de Nancy pour mettre fin au pillage des finances locales par ENEDIS, pillage qui peut être estimé, au plan national, à entre 10 et 15 milliards d’euros.

• Avec la procédure Nancy Thermal, démonstration est faite qu’en sortant du jeu les fonds d’investissement, la collectivité peut à la fois conserver la maîtrise de son service public, réaliser des économies considérables pour les contribuables et maintenir des tarifs abordables pour les usagers.

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