Les accords de libre-échange contre les peuples et le climat
Les années Reagan/Thatcher ont déclenché une vague de néo-libéralisme qui a déferlé sur la planète, emportant tout sur son passage. Les accords de libre-échange – bilatéraux ou multilatéraux – qui se sont multipliés depuis s’inscrivent parfaitement dans cette logique.
Leur objectif avoué est de favoriser la circulation des marchandises – en réduisant ou supprimant les barrières tarifaires et les formalités et en relevant les quotas d’importation – et des capitaux, pour faciliter les investissements à l’étranger. Mais ils ont aussi des conséquences moins avouables : en dépit des alléchantes promesses d’emplois et de prospérité avancées par leurs promoteurs – industriels, multinationales et tenants du néo-libéralisme –, ils s’accompagnent invariablement dans les pays riches de destruction d’emplois (via délocalisations et désindustrialisation), de nivellement des normes, de dumping social et salarial, tandis que dans les pays pauvres ils déstabilisent les économies rurales. Que peut par exemple le paysan andin contre le maïs américain subventionné, issu de l’agriculture intensive ?
Ces traités ou accords servent avant tout les intérêts des multinationales, au détriment de l’environnement, de la préservation de la biodiversité, de la souveraineté alimentaire des pays, des conditions de travail, de l’emploi, des droits sociaux, du bien-être animal. Ils renforcent la concurrence et favorisent le modèle extractiviste là où les défis majeurs à venir, climatiques et sociaux, devraient plutôt nous amener vers plus de coopération pour pouvoir y faire face collectivement.
Ces accords et traités instaurent par ailleurs un cadre juridique exceptionnel, hors de toute juridiction publique nationale ou internationale, qui permet à des entreprises multinationales de poursuivre un État devant un « tribunal d’arbitrage » si elles estiment que ses lois ou ses règlements pourraient leur porter préjudice. Ces tribunaux sont composés d’acteurs privés, juristes nord-américains pour la plupart, qui condamnent régulièrement les États à de lourdes amendes ou compensations, tout en captant au passage de généreux honoraires. Cette manière de détrousser les États au profit de grands groupes privés est une autre forme de nuisance de ces accords.
La seule Union Européenne (UE) a déjà signé une quarantaine de ces traités avec des pays tiers dont, récemment, le CETA conclu avec le Canada. Elle mène actuellement des négociations pour un accord de libre-échange avec les pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay et Bolivie). Pour éviter toute opposition frontale, en particulier des agriculteurs qui craignent à juste titre une inondation du marché européen par la viande sud-américaine, les négociations – qui ont connu un coup d’accélérateur ces dernières semaines – se déroulent dans la plus grande opacité, sans débat démocratique et dans un relatif silence médiatique. La France est opposée à ce traité, mais elle se retrouve de plus en plus isolée dans l’UE sur le sujet.
Le collectif « Stop CETA-Mercosur » mène actuellement une campagne contre cet accord, parfois qualifié d’accord « viande contre voitures», lourd de dangers pour l’agriculture européenne, pour nos normes sanitaires, pour l’environnement, le climat et la démocratie. Il lance un appel à soutenir son combat : communiqué de presse et vidéo. Une note de l’Aitec fait le point de la situation actuelle sur le sujet : note d’actualité